Le président Trump a poursuivi sa première tournée internationale et pendant ce temps, Mick Mulvaney, le directeur du budget à la Maison-Blanche a présenté son projet de budget cette semaine lors d’une séance d’information. Jusqu’à présent, le budget a reçu plus de critiques que d’éloges et des membres de la majorité républicaine à la Chambre des représentants ont exprimé leurs inquiétudes au sujet de certains éléments controversés. Avec ses coupes draconiennes combinées à… presque tout en fait… incluant le filet de sécurité sociale, une augmentation insuffisante des budgets pour les organismes de défense et pour les forces de l’ordre, et l’absence de propositions pour générer suffisamment de revenus, ce projet peine à trouver des partisans prêts à militer en sa faveur. Il est vrai qu’aucun projet de budget de la Maison-Blanche n’a jamais été accueilli chaleureusement, mais certains membres du Congrès ont déclaré que celui-ci était « mort dans l’œuf ».
Ce sombre regard sur la possibilité de voir le budget de la Maison-Blanche susciter un quelconque consensus traduit l’impression négative qui prévaut quant aux chances de voir quelque avancée que ce soit sur le plan législatif d’ici la fin de l’année. Nonobstant les enquêtes, la Maison-Blanche et le président de la Chambre ont du mal à se trouver des alliés pour leur programme législatif. Le fiasco entourant le projet de réforme des soins de santé a coûté cher politiquement aux républicains, et il ne leur reste plus d’appuis pour soutenir cette mesure législative à l’extérieur du Sénat, encore moins pour mener à bien la réforme fiscale, le dossier de l’infrastructure ou la réforme de l’immigration.
L’ALÉNA : premières étapes du positionnement du Canada
Aux États-Unis, le processus de renégociation de l’ALÉNA sera très public, tel que le prescrit l’Autorité pour la promotion du commerce (TPA). L’USTR a déposé sa demande de commentaires en vue de la renégociation de l’ALÉNA au registre fédéral mardi. Cela signale que les consultations avec les parties prenantes ont été amorcées de façon sérieuse. Puisqu’aucune provision similaire à celle de la TPA n’existe au Canada, le déroulement ici différera inévitablement, mais certains indices annonceront le positionnement canadien en cours de route.
À la fin de la semaine dernière, quelques pistes générales ont été esquissées dans la réponse formelle du Canada au décret présidentiel du 31 mars ordonnant au Département du commerce américain et à l’USTR d’examiner les causes des déficits commerciaux bilatéraux en vue d’« éclairer les décisions politiques futures ». Présentée par l’ambassade du Canada à Washington le 10 mai, la réplique canadienne fournit quelques indications utiles de l’approche globale qu’adoptera le Canada dans le cadre de la renégociation de l’ALÉNA :
Il n’y a aucun lien entre les accords commerciaux et la balance commerciale entre le Canada et les États-Unis
- « Rien ne prouve que les politiques et les pratiques décrites dans l’avis comme étant des causes possibles du déficit commercial américain exercent une influence significative sur la balance commerciale entre le Canada et les États-Unis.
- De plus, le gouvernement canadien met en doute deux importantes hypothèses sur lesquelles repose cet énoncé, à savoir que les barrières commerciales seraient les principaux facteurs responsables des déséquilibres commerciaux et que les restrictions en matière de commerce seraient une manière efficace de pallier de tels déficits ».
Le commerce entre le Canada et les États-Unis est mutuellement avantageux
- « Le Canada est la principale destination étrangère pour les exportations américaines de biens et de services… »
- « Le Canada est la principale destination d’exportation de marchandises pour 32 États américains… »
L’intégration des échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis
- « Nos échanges commerciaux sont caractérisés par un haut niveau de production intégrée, avec des entreprises des deux côtés de la frontière qui font appel aux intrants de l’autre pays ».
- Environ 17,5 p. 100 de la valeur des exportations canadiennes de biens et de services aux États-Unis contiennent du contenu importé des États-Unis, « 26,2 p. 100 dans le cas du secteur de la fabrication. »
Le Canada est un fournisseur d’énergie sûr et responsable pour les États-Unis
- « Pour le pétrole brut, le Canada a satisfait environ 39 p. 100 de la demande d’importation américaine entre 2014 et 2016 (par volume).
- “Si l’on exclut l’énergie de la balance commerciale, les États-Unis ont affiché des excédents commerciaux de marchandises avec le Canada pour les produits non énergétiques depuis les dernières 10 années”.
Freeland et les charmes de l’érable
L’offensive de charme “au goût d’érable” se poursuit. Alors qu’elle prenait la parole à Mexico cette semaine, la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, a révélé quelques détails intéressants au sujet de l’effort de séduction canadien à l’endroit de l’administration Trump et du Congrès en vue des pourparlers de renégociation de l’ALÉNA – en dépit des propos fermes qu’elle a tenus la semaine dernière sur les moyens de rétorsions et de représailles. L’abondance des données canadiennes a permis à celles-ci de pénétrer des circonscriptions électorales individuelles et de démontrer les avantages, sur le plan local, du commerce avec le Canada. Elle a indiqué qu’elle avait été en mesure de dire à Paul Ryan, président de la Chambre des représentants, que son district du Wisconsin avait des échanges commerciaux annuels de l’ordre d’un milliard de dollars avec le Canada, ce qui l’a émerveillé. Freeland a également souligné que depuis que le président Trump était entré en fonction en janvier, 235 réunions s’étaient tenues entre des fonctionnaires canadiens et américains et 110 visites politiques pour rencontrer Trump et ses fonctionnaires ont eu cours aux États-Unis. Des représentants canadiens ont également rencontré 115 membres du Congrès et 35 gouverneurs ou lieutenants-gouverneurs.
Les fabricants d’automobiles et le milieu syndical se préparent
Les fabricants d’automobiles et les syndicats de travailleurs se préparent aux pourparlers sur l’ALÉNA et commencent à faire connaître leurs listes de demandes avant le début des renégociations. La semaine dernière, lors d’une rencontre avec le secrétaire américain au Commerce Wilbur Ross, le président de Unifor National, Jerry Dias, a indiqué que le nombre croissant d’importations de véhicules provenant de régions extérieures à l’ALÉNA (presque un quart du marché nord-américain) représentait “un enjeu plus important pour les emplois que les déséquilibres commerciaux à l’intérieur de la région”. Il a ajouté qu’une approche coopérative à l’échelle du continent pourrait aider à rééquilibrer les flux commerciaux et les normes du travail.
Le président du American Automotive Policy Council (AAPC), Matt Blunt, a déclaré que les constructeurs d’automobiles américains voient dans la renégociation de l’ALÉNA l’occasion “d’encourager l’acceptation, à l’échelle internationale, des normes américaines de construction d’automobiles en matière de sécurité automobile” et de saper les efforts européens en faisant de ses normes (américaines) la norme mondiale. Les constructeurs d’automobiles canadiens se sont rangés à cet avis au début du mois de mai lorsqu’ils ont pris la parole devant le Comité de commerce de la Chambre des communes du Canada. David Paterson, vice-président des affaires publiques et de l’environnement chez General Motors du Canada, a déclaré au comité : “nous devrions tabler sur les progrès réalisés dans le cadre du Conseil de coopération en matière de réglementation et ailleurs pour harmoniser nos normes techniques des véhicules au sein de l’ALÉNA, tout en insistant pour que les pays à l’extérieur de l’ALÉNA reconnaissent et acceptent nos normes techniques.” Des deux côtés de la frontière, l’industrie reconnaît que le seuil des règles d’origine de l’ALÉNA de 62,5 p. 100 pour les automobiles ne devrait pas être modifié, même si le secrétaire Ross a préconisé de passer à un seuil beaucoup plus élevé.
Trump et l’OTAN : pas de carottes, seulement le bâton
Le président Trump est arrivé à Bruxelles quelques jours seulement après l’attentat à la bombe de Manchester qui a fait 22 morts et un bien plus grand nombre de blessés, surtout des femmes et des jeunes filles. Le clivage qui est apparu entre les services de renseignement des États-Unis et de la Grande-Bretagne s’est creusé dans les jours qui ont suivi et il a jeté une ombre sur la relation étroite dont jouissent habituellement les deux partenaires fondateurs de l’OTAN. La bousculade dont a été victime le premier ministre du Monténégro a témoigné de la nécessité, chez Trump, d’être sous les projecteurs, un comportement qui a fait sa réputation. Des visages sévères ont accueilli le président Trump lorsqu’il a continué de pousser les 23 alliés de l’OTAN qui ne consacrent pas encore 2 % de leur PIB à la défense (le Canada étant l’un de ceux-ci) à dépenser ce qui est généralement considéré comme leur juste part. S’il est évident qu’il souhaite que l’OTAN adhère à son point de vue, son discours a clairement établi que la doctrine de Trump, dans son essence, repose sur les rapports avec les principaux alliés du Moyen-Orient (Arabie Saoudite). Il a notamment refusé de souscrire à l’article 5, qui n’a été évoqué qu’une seule fois, le 11 septembre 2011.