• Mar 13, 2019
  • Perspectives

Les Canadiens ont un problème de confiance envers les politiciens

Écrit par Doug Anderson

On peut faire confiance à ceux pour lesquels on a voté mais on fait rarement confiance aux politiciens en général

Les Canadiens ont récemment entendu le premier ministre parler d’une « érosion de la confiance » entre une ministre et son bureau mais ce terme décrit aussi une tendance du grand public liée aux politiciens et à l’estime qu’ils suscitent chez les électeurs. Même avant que l’affaire SNC-Lavalin occupe le devant de la scène, les Canadiens avaient un important problème de confiance envers les politiciens.

Un sondage mené fin janvier et début février, par Earnscliffe, donne un aperçu de l’opinion de référence « pré-SNC » des Canadiens, il y a à peine quelques semaines. Il brosse un tableau de la société où seul un électeur sur cinq (21 %) estime que « la plupart des politiciens sont essentiellement dignes de confiance » et environ le tiers des électeurs (32 %) sont d’avis que seuls les politiciens pour lesquels ils ont voté sont dignes de confiance. L’autre moitié des électeurs du Canada (47 %) estiment que ni la plupart des politiciens en général, ni même ceux pour lesquels ils ont voté, sont dignes de confiance. Par ailleurs, l’admiration pour des personnes qui passent toute leur carrière en politique ou dans les coulisses du milieu politique se situe à peine à 28 %, soit légèrement plus que le quart des électeurs canadien.

« Nous savons depuis des années que le concept plutôt généralisé de ‘’confiance envers les politiciens’’ est en baisse. Mais il est très utile et même encourageant de constater que les Canadiens ne veulent pas nécessairement dire TOUS les politiciens. En posant de multiples questions sur la notion de la confiance envers les politiciens, il est plutôt clair que l’opinion canadienne est plus nuancée. Cela peut paraître étonnant mais la moitié des électeurs qui vont aux urnes ressortent de leur bureau de vote avec l’impression d’avoir voté pour quelqu’un qui est digne de confiance », a indiqué Doug Anderson, partenaire chez Earnscliffe et l’un des principaux chercheurs de cette étude.

Parmi les Canadiens qui appuient un parti en particulier par rapport aux autres, les partisans des Libéraux sont plus susceptibles d’estimer que la plupart des politiciens sont dignes de confiance (27 %). Les partisans des Conservateurs sont légèrement moins susceptibles que les autres de faire confiance aux politiciens – qu’ils votent pour eux ou non – mais aucun groupe de partisans ne sont plus méfiants que les électeurs indécis. Au moins les trois-quarts (74 %) des électeurs indécis sont d’avis que les politiciens en général, mêmes ceux pour lesquels ils ont voté, ne sont pas dignes de confiance.

Notamment, ces sentiments varient peu par sexe ou par région, à l’exception de deux segments de la population : les électeurs canadiens âgés de 65 ans ou plus démontrent un niveau beaucoup plus élevé de confiance envers la plupart des politiciens (25 %) et envers les personnes pour lesquelles ils ont voté (42 %); et les électeurs de l’Alberta sont les moins susceptibles de faire confiance à tout politicien.

La perception des gens sur l’avenir et leur sentiment à propos de leur qualité de vie sont positivement liés à la confiance. Plus une personne se sent optimiste à propos de son avenir ou plus elle accorde une note favorable à son propre niveau de vie (NdV), plus elle est susceptible de penser que les politiciens sont dignes de confiance. 

La recherche fait également ressortir une corrélation assez forte entre la confiance et les deux éléments suivants : la mesure dans laquelle les gens s’intéressent à l’actualité ainsi que la fréquence à laquelle ils participent à des élections.

Considéré dans leur ensemble, ces résultats donnent à penser que la confiance (ou le manque de confiance) envers les politiciens dépend largement de la façon dont une personne participe. Ce qui est intéressant dans cette observation, c’est que ce n’est pas seulement une participation politique (c.-à-d. voter) ou civique (c.-à-d. suivre l’actualité) qui inspire la confiance. La confiance est également liée au statut socioéconomique (à savoir, si la personne réussit ou perd du terrain) et aux conceptions (à savoir, si la personne est optimiste – et a de quoi se réjouir – ou pessimiste – et est tournée vers le passé).

Cette corrélation à multiple facettes soulève donc une question plutôt fondamentale, la confiance (ou le manque de confiance) résulte-t-elle de la participation (sur les plans politique, économique, civil ou émotionnel) ou bien la participation est-elle fonction de la confiance (envers les personnes sur lesquelles nous devrions compter pour nous représenter et nous protéger)? Nous pouvons choisir de suivre l’actualité ou de participer aux élections mais nous ne pouvons pas choisir notre statut socioéconomique ou notre situation sociale. Cela étant, le lien entre confiance et participation prend probablement le premier sens plutôt que le deuxième. Cela donne également à penser que la confiance peut non seulement être perdue mais qu’elle peut aussi être obtenue. En d’autres mots, plus nos politiciens s’attaquent aux inégalités et donnent aux électeurs le sentiment qu’ils participent à la société en général (que voter est important, que l’actualité les touche et qu’ils ont de quoi se réjouir) plus la confiance peut être regagnée.

Dans la même veine, les électeurs continuent manifestement de vouloir que leurs politiciens adoptent un comportement plus constructif que ce à quoi ils sont habitués. La plupart des électeurs disent qu’ils en ont plus qu’assez de la façon dont les politiciens se chamaillent et quelques-uns appuient généralement les politiciens de l’opposition qui critiquent le parti ou les politiciens au pouvoir – cependant, ce n’est pas parce qu’ils sont d’avis que les gouvernements servent bien, en général, les intérêts de la population. La majorité d’entre eux estiment que la plupart des politiciens ont plus à cœur de se faire élire que de bien faire les choses.

Il faudra mener une nouvelle recherche pour mesurer si les événements politiques récents auront causé quelque changement que ce soit à ces cotes de confiance politique – pour le meilleur ou pour le pire. Ces données qui précèdent la controverse liée à l’affaire SNC-Lavalin constituent un bon point de départ.

« La capacité de faire confiance à plus d’un candidat sur un bulletin de vote est cruciale pour le maintien d’une démocratie saine et respectueuse. Lorsque que cette confiance devient extrêmement polarisée ou pire – inexistante – cela ouvre la porte à d’autres problèmes tels que la quête d’un politicien ‘’authentique’’ comme un populiste. Trop souvent, la recherche de cette authenticité attire des candidats déplorables. Le Canada y est tout aussi vulnérable que toute démocratie moderne », explique Allan Gregg de la firme Earnscliffe.

Méthodologie : 

Les résultats sont fondés sur un sondage en ligne mené auprès de 2427 électeurs canadiens admissibles recrutés au hasard à partir du panel d’internautes LegerWeb, entre le 25 janvier et le 5 février 2019. À l’aide de données provenant du recensement 2016, les résultats ont été pondérés en fonction de l’âge, du sexe et de la région afin de s’assurer que l’échantillon est représentatif de l’ensemble de la population. Puisqu’il s’agissait d’un échantillon non probabiliste, on ne peut pas associer de marge d’erreur aux résultats, pas plus qu’il ne convient d’offrir une marge d’erreur comparative indicative du degré d’exactitude des résultats si l’étude avait été effectuée à l’aide de méthode d’échantillonnage aléatoire.

Questions citées dans ce rapport :

Veuillez indiquer dans quelle mesure vous êtes en accord ou en désaccord avec chacun des énoncés suivants :

  • Il est crucial que le Canada élise un leader particulièrement solide lors de la prochaine élection
  • Je trouve que les élections fédérales canadiennes sont très intéressantes
  • La plupart des politiciens de l’un ou l’autre des partis sont dignes de confiance
  • Les politiciens pour lesquels j’ai voté sont plutôt dignes de confiance
  • La plupart des politiciens ont plus à cœur de se faire élire que de bien faire les choses
  • J’admire les gens qui passent toute leur carrière en politique ou dans les coulisses du milieu politique
  • Les gouvernements servent généralement bien l’intérêt public
  • J’en ai plus qu’assez de la façon dont les politiciens se chamaillent
  • J’appuie généralement les politiciens de l’opposition qui critiquent le parti ou les politiciens au pouvoir
Contact :

Doug Anderson, partenaire
613-563-4455

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