• Juin 07, 2024
  • Perspectives

L’Assemblée nationale du Québec ajourne ses travaux pour la période estivale

THE CANADIAN PRESS/Jacques Boissinot

Le vendredi 7 juin, l’Assemblée nationale a ajourné ses travaux pour la période estivale après un début de session législative tumultueux.

La session a été marquée par des controverses politiques et d’importants problèmes financiers. Le gouvernement provincial accusait un déficit budgétaire considérable, ayant atteint 11 milliards de dollars, ce qui était au-delà des niveaux observés pendant la pandémie.

Outre les questions fiscales, le premier ministre Legault a dû répondre à des allégations selon lesquelles les maires devaient verser un don à la CAQ pour avoir accès à ses ministres, ce qui a suscité des inquiétudes quant à l’intégrité du processus politique. En réponse à ces allégations, M. Legault a décidé de refuser tout don versé à son parti.

Après une baisse importante de la cote de popularité du Parti de la Coalition Avenir Québec au cours des six derniers mois, les résultats du dernier sondage Léger montrent que le parti a gagné trois points pour atteindre 24 %. Cependant, le Parti Québécois reste en tête avec 32 % des intentions de vote dans les derniers sondages.

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Entre-temps, l’élection de la direction du Parti libéral du Québec aura lieu au printemps 2025. Le chef intérimaire, Marc Tanguay, est pour l’instant le favori, avec 30 % d’appuis, ce qui est nettement plus élevé que Denis Coderre, l’ancien maire de Montréal, qui compte en ce moment 12 % d’appuis. Les prochaines élections générales provinciales du Québec ont été fixées au 5 octobre 2026. Bien des choses peuvent donc changer d’ici là.

Les investissements dans le système de soins de santé ont été l’une des dépenses les plus importantes du budget 2024-2025. Les dépenses dans ce secteur ont en effet augmenté de 4,3 % par rapport à l’année précédente. En tout, 3,7 milliards de dollars sont consacrés à l’amélioration de l’accès aux soins de santé et des services de santé et à la réduction du temps d’attente dans les salles d’urgence.

La mise en place de Santé Québec s’est avérée complexe. La nomination du magnat de l’hôtellerie, Christiane Germain, à la présidence du conseil d’administration et sa rémunération annuelle de 173 000 $ – quatre fois plus élevée que ce qui était prévu il y a un an – ont suscité des controverses. Le Parti Québécois a accusé le gouvernement de faire un mauvais usage des fonds publics, et souligné que la PDG de Santé Québec, Geneviève Biron, gagnera plus de 652 000 $ au cours des deux premières années de son mandat. Québec Solidaire a également noté qu’aucun des membres du conseil d’administration n’avait une expérience des services sociaux.

Le Conseil de transition de Santé Québec publiera son premier rapport d’étape en mai 2025, les rapports suivants étant prévus le 12 septembre et le 12 décembre 2025.

Pour réduire le temps d’attente dans les salles d’urgence, le gouvernement du Québec prévoit de créer une « équipe volante » de professionnels de la santé. Cette initiative vise à réduire la dépendance du système de santé aux agences privées pour remédier aux pénuries de personnel. Le gouvernement s’est associé à la Confédération des syndicats nationaux (CSN) et à la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec (FTQ) pour trouver des solutions aux graves pénuries de personnel qui touchent diverses régions. L’équipe sera composée d’infirmières et d’aides-soignants.

Le gouvernement du Québec a présenté la mise à jour du Plan québécois des infrastructures 2024-2034, qui prévoit des investissements de 153 milliards de dollars dans l’amélioration des infrastructures dans le domaine de l’éducation, de la santé et des services sociaux, des réseaux routiers et du transport en commun, ainsi que du logement social et communautaire. La revitalisation des infrastructures vieillissantes du Québec est une priorité pour le premier ministre Legault depuis son premier mandat, moment où son gouvernement avait adopté une loi visant à accélérer certains projets d’infrastructure dans des domaines prioritaires. Toutefois, les projets accélérés n’avancent que lentement, et des rapports récents montrent que sur 182 projets, 42 seulement ont été terminés depuis l’adoption de la loi, en 2020. Les progrès dans le domaine de l’éducation, de la modernisation des hôpitaux et du réseau routier ont été particulièrement lents, aucun projet n’ayant été achevé.

Par ailleurs, dans un rapport déposé à l’Assemblée nationale, la vérificatrice générale, Guylaine Leclerc, montre que l’état des collèges publics de la province s’est détérioré au cours des cinq dernières années et que le budget du ministère de l’Enseignement supérieur couvre moins de la moitié du montant nécessaire pour renverser la tendance. La proportion de bâtiments classés en mauvais ou très mauvais état est passée de 24 % en 2019 à 65 % cette année.

Bien que le gouvernement ait consacré un peu plus de 608 millions de dollars à l’entretien des infrastructures des cégeps entre 2023 et 2028, Mme Leclerc calcule qu’il faudrait compter sur la somme de 1,7 milliard de dollars. La crise dans le secteur de l’éducation du Québec a été aggravée par la fermeture d’environ 800 écoles publiques en raison d’une grève de la Fédération autonome de l’enseignement (FAE) cet automne, au cours de laquelle 368 000 élèves ont manqué 22 jours d’école. Le ministre Drainville a signalé que l’on ne connaîtra l’ampleur des effets de cette grève qu’en 2025.

La situation du Québec s’est exacerbée au regard de l’énergie. Le gouvernement de la CAQ s’est donc vu pressé de trouver des solutions et les relations entre le ministre Fitzgibbon et le PDG d’Hydro-Québec, Micheal Sabia, s’en sont trouvées plus tendues. Une étude récente des Manufacturiers et Exportateurs du Québec (MEQ) a révélé que, sur 114 entreprises interrogées, 73 % devront retarder leurs projets ou investissements prévus en raison des pénuries d’électricité.

Un élément clé du plan gouvernemental visant à remédier aux pénuries d’énergie a été présenté à l’approche de la clôture de la session de printemps 2024 : le projet de loi 69 sur la réforme énergétique du ministre Fitzgibbon, qui permettra aux distributeurs privés d’électricité de vendre leur électricité aux clients voisins s’ils peuvent prouver qu’ils sont en mesure de construire le raccordement par leurs propres moyens.

En outre, les augmentations de tarifs d’électricité seront limitées à un maximum de 3 % jusqu’aux élections générales québécoises de 2026. À partir d’avril 2026, la Régie de l’énergie devrait fixer « un ou plusieurs tarifs » pour « encourager la réduction de la consommation d’électricité pendant les périodes de pointe », ce qui permettrait à Hydro-Québec de fixer des tarifs plus élevés pour l’électricité pendant les périodes de forte consommation.

Le projet de loi 69 intitulé loi assurant la gouvernance responsable des ressources énergétiques et modifiant diverses dispositions législatives, a été déposé l’avant-dernier jour de la session et sera étudié à l’automne, lors de la reprise des travaux. Des consultations avec les principaux intervenants devraient avoir lieu cet été.

Le gouvernement et Hydro-Québec continueront à chercher des solutions alternatives aux pénuries d’énergie. Ils évalueront notamment la possibilité de créer des partenariats et évalueront le rôle de la production privée d’énergie. Un plan de gestion intégré des ressources énergétiques sera mis en place d’ici un an environ, après l’adoption du projet de loi sur la réforme de l’énergie.

Depuis deux mois, il y aurait des rumeurs selon lesquelles le ministre Fitzgibbon pourrait démissionner avant la fin de son mandat, ce que le principal intéressé a lui-même évoqué. Ceci dit, le ministre et ses proches ont confirmé qu’il avait l’intention de rester en poste jusqu’en 2026, tout au moins pour superviser l’adoption et la mise en œuvre rapide des mesures de réforme énergétique.

L’acceptabilité sociale des grands projets de développement économique, d’énergie et de ressources naturelles a divisé les politiciens du Québec. Les groupes de la société civile s’opposent de plus en plus aux grands projets, comme ils l’ont fait récemment pour le projet d’usine de batteries Northvolt, l’un des projets les plus importants du Québec dans le domaine du développement de l’industrie des batteries. Ces groupes s’inquiétaient surtout des effets possibles du projet sur l’environnement et de l’absence de processus formel de consultation publique. Au cours de la dernière session, le gouvernement a tenté de répondre à certaines des doléances du public en présentant un projet de loi visant à apporter une série de réformes aux lois minières du Québec, notamment la tenue obligatoire d’une consultation publique pour tout nouveau projet minier.

  • Projet de loi 51, Loi visant à moderniser l’industrie de la construction : adopté le 28 mai 2024.
  • Projet de loi 41, Loi édictant la Loi sur la performance environnementale des bâtiments et modifiant diverses dispositions en matière de transition énergétique : adopté le 27 mars 2024.
  • Projet de loi 31, Loi modifiant diverses dispositions législatives en matière d’habitation : adopté le 21 février 2024.
  • Projet de loi 65, Loi limitant le droit d’éviction des locateurs et renforçant la protection des locataires âgés : adopté le 6 juin 2024.

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